Nous étions 19 au rendez-vous fixé devant l’ancienne mairie de St Rambert Lyon 9ème par une belle journée ensoleillée.
C’est notre ami Gérard qui va être notre guide pour la visite du village de St Rambert et de l’Ile Barbe

Village de St Rambert
Après une brève introduction sur le passé du village de St Rambert et de la mairie, Gérard nous conduit à ‘église néo-romane du XIXème siècle qui a remplacé l’église romane du XIème siècle Nous avons pu, particulièrement, apprécier l’autel en pierre polychrome (Annonciation et Visitation) et un chapiteau (creusé et utilisé comme bénitier) venant tous deux de l’église abbatiale Saint Martin – Saint Loup (Abbaye de l’Ile Barbe) ainsi que les vitraux de Pagnon Déchelette.
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Ensuite nous avons visité le bourg de Saint Rambert en empruntant la grande rue : l’ancienneté du village est prouvée par les vestiges de la présence de patriciens romains (fondations de maisons et thermes), en passant nous avons vu les indications marquées des variations du niveau de la Saône (crue de 1840) ou la baisse de niveau : passage à gué en 1740 à l’emplacement du pont actuel.
La Saône a été relevée de 2,50m pour la navigation de gros porteurs.
L’Ile Barbe
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En empruntant le pont, nous nous rendons sur l’ile Ce n’est qu’en 1734 qu’on envisage de la relier à la terre ferme en bâtissant un pont de bois, du côté de Saint Rambert, emporté par une crue de la Saône en 1763. Il faudra attendre 1827 pour, construire, sur les plans de l’ingénieur Favier, un nouveau pont, testé et achevé en 1829. Les câbles actuels ont remplacé les chaînes. La partie de l’île pouvant être visitée est un charmant îlot de verdure avec des maisons anciennes et quelques vestiges des bâtiments religieux.
De nos jours, seules visibles, subsistent : l’église romane Notre-Dame, le Châtelard (bâtisse la plus haute de l’île) maison du cellérier servant d’asile en cas de péril imminent et qui contient une chapelle romane abritant de remarquables fresques byzantines du XIIIème (très bien conservées car recouvertes pendant plusieurs siècles)
image007.jpg Il reste également des éléments du cloître de l’abbaye et une partie du transept de l’église abbatiale. Le musée de Gadagne et la Bibliothèque municipale de Lyon conservent de nombreux vestiges de l’abbaye. . Pendant plus d’un millénaire, l’île Barbe abrita un des plus vieux exemples de patrimoine paléochrétien, une abbaye dont la tradition fait remonter l’origine aux premiers martyrs lyonnais. Cette ancienneté constitua tout au long de son histoire un motif de fierté pour les moines de l’île Barbe
La seigneurie du monastère se constitua au fil des siècles, traversant les époques, carolingiennes puis romanes, pour enfin atteindre son apogée au XIIIème siècle, avant d’endurer une lente décadence, qui se clôturera par la vente du domaine après la Révolution (1793). A l’heure actuelle, il ne reste plus grand chose pour témoigner de la présence en ces lieux d’une des plus importantes abbayes de la région. Le clocher de la chapelle est en cours de rénovation (échafaudages) et a trouvé sa couleur d’origine
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La Chapelle Notre-Dame de Grâce fut longtemps l’objet de la dévotion des Lyonnais. En 1491, 79 personnes sont requises pour accueillir les pèlerins ! Au XVIème siècle, les paroissiens de Lyon s’y rendaient en pèlerinage. L’affluence va réduire progressivement aux XVIIème et XVIIIème siècles face à la concurrence grandissante de Notre-Dame de Fourvière. Les bateliers qui longeaient l’île se découvraient, dit-on, à la vue de la Chapelle Notre-Dame de Grâce. Depuis quelques années, la chapelle Notre Dame (propriété privée) fait l’objet de nombreuses restaurations. Notre Dame de Grâce est dédié à la Vierge Marie suivant la tradition bénédictine qui lui vouait une dévotion particulière. Des fouilles y ont été réalisées (ainsi qu’en d’autres lieux, près du cloître et au prieuré Saint André-Saint Anne) par une archéologue, Charlotte Gaillard, qui a présenté sa thèse récemment. Nous avons visité cette chapelle construite dans les années 1070, sur la demande de l’abbé Ogier , pour l’accueil des pèlerins hors de la clôture du monastère afin de ne pas troubler le recueillement des moines. La nef principale s’est affaissée au XIXe s. La galerie latérale en partie romane et en partie gothique est devenue la chapelle actuelle, voisine de la maison du sacristain.
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Le sol a été rehaussé de 1,50 m. Les piliers et chapiteaux sont pour la plupart romans.Les voûtes gothiques ont été refaites au XVème s. Nous avons pu admirer les arcs, les chapiteaux, les clés de voûtes, un enfeu et des traces de passage de pèlerins dont un daté de 1510. Dans le chœur un vitrail de 1957 s’intègre bien dans l’ensemble. Sous le clocher de nombreuses fresques de différentes époques nécessitent une rénovation importante : Visitation, Mariage de Marie et Joseph, Massacre des Innocents, Fuite en Egypte, baptême de Jésus, etc. et feront l’objet de futurs travaux.

12H30, il est temps de rejoindre le restaurant « Les Voûtes »,
image015.jpg situé sur la rive gauche de la Saône, au XVIème siècle ancienne champignonnière. Après un succulent repas, bien installés dans une grande salle voutée avec vue sur la chapelle Notre Dame de Grâce, nous avons rejoint le musée Jean Couty pour une visite guidée par Bernard Gouttenoire, écrivain, critique d’art en peinture et sculpture lyonnaises.
Musée Jean Couty

Jean Couty, malgré sa formation d’architecte, est devenu peintre sur les conseils de Tony Garnier (1869-1948) qui résidait, non loin de là, sur les quais de Saône. Charles Couty, le fils du peintre, a fondé ce musée dont l’ouverture date du printemps 2017. Jean Couty est né dans la maison familiale de Saint Rambert en 1907 et décédé en 1991. Il aurait donc 110 ans. Il y a vécu, travaillé au dernier étage, dans la maison voisine du musée où réside actuellement l’épouse de l’artiste, Simone Couty. Au fil de la visite, Bernard Gouttenoire nous a fait découvrir la première salle avec des peintures sur des sujets multiples, puis des salles, sur 2 niveaux organisées par thèmes (scènes de genres et portraits, paysages, églises romanes, chantiers, vues de Lyon, voyages, natures mortes). Selon notre guide, « la gamme de couleurs de l’école lyonnaise est composée d’une grande variété de nuances sombres et austères avec une base de gris « bouchés. Toute la beauté de la peinture réside, entre autres, dans les nuances de gris : gris-vert, gris-marron, gris-jaune… autant de gris qui créent une ambiance artistique ».
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A l’étage, un montage audio-visuel sur la vie de l’artiste et son œuvre, des dessins et une reconstitution de son atelier sont présentés.

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Après cette belle journée historique, gastronomique et artistique, l’heure est venue de nous saluer avant de repartir dans nos foyers.

Histoire de l’Ile Barbe
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L’île Barbe se situe sur la Saône, à environ 6 km au nord de Lyon sur l’ancienne commune de Saint Rambert.
L’île Barbe est annexée au 5e arrondissement de Lyon en 1963, suite à une forte urbanisation, une partie de Lyon 5e est devenue Lyon 9e en 1964 (Vaise, Rochecardon, La Duchère et Saint Rambert). Saint Rambert s’est fortement développé sur le plateau depuis les années 1970.
Actuellement, il reste un agriculteur et ses terres représentant la dernière ferme sur le territoire de la ville de Lyon.
Le voyageur qui descendait la Saône au Moyen Âge découvrait au nord de l’île, dressée sur un promontoire rocheux, une puissante tour carrée surmontée de mâchicoulis, connue sous le nom de tour du prieur.
Le donjon jouxtait les vestiges d’une chapelle dédiée à Sainte-Anne. La légende voulait que le corps de la mère de la Vierge fût enterré sur l’île.
D’après Claude Le Laboureur (prévôt), il semble que vers 240, un nombre conséquent d’ermites s’étaient retirés sur l’île, assez en tout cas pour qu’un seigneur, nommé Longinius, décide de les regrouper dans un monastère. Les plus anciens restes de l’île ont été trouvés dans sa partie septentrionale au niveau du prieuré Saint André-Sainte Anne sur lesquels sont bâties des maisons depuis le siècle dernier, mais dont les sous-sols ont été récemment sondés lors de rénovations. De nombreuses légendes, liées à la vie de l’abbaye, sont peu tangibles : la présence du Saint Graal, reliques de Sainte Anne (Mère de Marie) déposées ici, Longinius ayant percé avec sa lance le flanc du Christ se serait retiré ici (dates vérifiées : confusion avec un autre Longin), etc …
Deux éléments plus crédibles. La bibliothèque créée avec l’aide de Charlemagne, qui contenait des manuscrits rares situés à l’époque dans le Châtelard est conservée en partie à la Bibliothèque Municipale de Lyon.
L’histoire de l’olifant (cor) de Roland de Roncevaux est probable du fait que la famille de Roland était liée à la famille des Montdor ou Mondor. La commune de Saint Didier au Mont d’ Or affiche l’olifant sur son blason. Cet olifant était exposé pendant les grands pèlerinages, grandes cérémonies et fêtes. Il aurait été dépouillé de ses ornements (or et pierres) lors du passage du baron des Adrets en 1562 et abandonné sur les ruines, puis récupéré par la famille Mondor.
L’existence du monastère est attestée par Grégoire de Tours, important historien de l’Église et évêque vivant au VIème siècle, qui mentionne le séjour de Maxime, disciple de Saint-Martin de Tours, sur l’île.
Saint-Martin est le fondateur, en 360, du monastère de Ligugé (Vienne), considéré comme le tout premier monastère français. La règle de Saint Martin a été suivie plus tard par celle de Saint Benoît. Au cours de son histoire, l’île constitua une destination privilégiée pour les exilés. L’abbaye de l’île Barbe a entretenu des liens avec celle de Lérins (île au sud de Cannes).
Malgré les outrages qu’elle va subir au VIème et VIIème siècles, l’abbaye prospère. Il est difficile cependant d’établir l’étendue de ses possessions à cette époque.
Le plus ancien document conservé aux Archives Départementales du Rhône est une charte de Charles de Provence en faveur de l’abbaye de l’Ile Barbe de 863. Elle a été récemment restaurée car très endommagée (retrouvée en 1914 sous les combles de la cathédrale Saint Jean, où elle avait été dissimulée pendant la Révolution).
Ce n’est qu’avec le diplôme de confirmation des biens et privilèges accordé en 971 par le roi de Bourgogne de l’époque, Conrad, et dans une moindre mesure le rapport de Leidrade vers 810, qu’on peut estimer l’importance et la localisation du patrimoine de l’abbaye. Leidrade, évêque de Lyon, procède, sans doute à partir de 807, à un ambitieux programme de restauration des divers établissements religieux de Lyon
Il adresse à Charlemagne une lettre qui restera célèbre, par laquelle il témoigne de son activité à Lyon. Le sort de l’abbaye y est abordé. L’évêque précise qu’il en fait refaire les toits et redresser certains murs. On y apprend que l’abbaye peut désormais accueillir 90 moines. Leidrade engage également une restauration spirituelle des lieux. image023.jpg
Au cours des siècles qui suivent, l’étendue du patrimoine de l’abbaye ne va cesser de s’étendre, en même temps que son rayonnement spirituel, matériel, intellectuel et artistique. Au XIIème siècle, l’abbaye possède 113 églises et 48 prieurés (Dombes, Forez, Provence, Dauphiné, Alpes).

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En 1362, lorsqu’on fera transcrire l’ensemble des titres de l’abbaye concernant ses terres, le tout formera un rouleau de 43 peaux de vélins et 33 m de long. Le fameux rouleau de l’île Barbe est conservé de nos jours aux Archives Départementales du Rhône.

L’abbaye avait subi de nombreuses invasions (725 : Sarrazins, IXème s : Huns venant de Hongrie). En 1562, l’Ile Barbe est ravagée par les troupes protestantes du Baron des Adrets. Il fallut plusieurs dizaines d’années pour effacer les outrages matériels de ce pillage. L’abbaye ne s’en relèvera jamais totalement, malgré les efforts conduits par le prévôt Claude Le Laboureur pour essayer de rétablir une vie spirituelle à la hauteur de celle qui faisait la réputation de l’abbaye les siècles précédents.
En 1551, à la demande des moines de l’île, l’abbaye est transformée en collégiale (chanoines, clergé séculier). Cette transformation fut à l’ origine du déclin de l’abbaye par le fait d’une règle et d’obligations moins strictes. Les chanoines vivaient dans des maisons sur l’île ou à l’extérieur.

Au XVIIIème siècle, la chute des revenus de l’abbaye et le nombre peu élevé de chanoines qui y demeurent encore poussent l’archevêché lyonnais à la décision d’unir l’Ile Barbe au chapitre de la Cathédrale de Lyon. Les archives et le trésor de l’abbaye, du moins ce qu’il en reste, sont transférés dans le trésor de la Cathédrale.
L’Ile Barbe accueille à partir de 1741 le séminaire Saint-Pothin pour prêtres âgés.
En 1783, le séminaire est à son tour supprimé, et, dix ans plus tard, les vestiges de l’abbaye vendus aux enchères comme bien national à un avoué lyonnais pour la somme de 166 000 livres A la mort de l’avoué, le terrain est morcelé pour être vendu à nouveau.
Le village de l’île se constitue peu à peu à partir de cette époque sur les vestiges de l’abbaye. Jusqu’au XVIIIème siècle l’accès à l’île s’est toujours fait par la rivière, ce qui, d’une certaine manière, garantissait à l’abbaye un certain isolement.
A Lyon, au mois de mai, une des fêtes les plus curieuses voulait qu’on élise, parmi les clercs du palais, le roi de la basoche, en référence à un ancien usage autorisé par les concessions des Rois de France. C’était l’occasion d’un défilé à travers les rues de la ville, qui parodiait le faste de la cour. Son passage à l’église de l’île donnait lieu à des manifestations encore plus pompeuses. Il embarquait dans une petite flotte garnie pour l’occasion de canons, au son de l’artillerie remontait la Saône jusqu’à l’île Barbe, où il était cérémonieusement conduit jusqu’à l’église pour y faire de riches présents.
L’île Barbe, au terme d’une histoire mouvementée, semble à présent se prélasser au gré des flots de la Saône. De la seigneurie qui rayonna pendant plus de trois siècles, il ne reste que quelques malheureux vestiges qui fournirent les fondations d’un village somnolant.

Rédaction : G Bouteille, J Guerreiro
Photos : B Bisson , G Bouteille, J Guerreiro

Histoire : documents : Site Internet Ile Barbe, G Bouteille

Mise en page : J Guerreiro